Un tableau accroché au mur et 90 ans plus tard….

C’était, je crois, mon premier « billet d’humeur, billet d’humour », voire même ma toute première publication sur ce blog. Je vous parlais alors d’un nonagénaire Maurice (https://sous-la-plume-de-jeanne.blog4ever.com/le-nonagenaire-qui-voulait-feter-ses-102-ans). Probablement fidèle lecteur de son quotidien régional puisque c’est dans ledit quotidien que je fis sa connaissance. Plus précisément à la rubrique « Courrier des lecteurs ».

Qui veut apprendre sur la vie, la comprendre, qui veut savoir comment le monde tourne autour de notre petit nombril se rendra dans la rubrique du « Courrier des lecteurs ». A tous les media qui offrent encore cet espace de liberté d’expression, merci. Il est parfois des lettres de cette rubrique qui n’ont rien à envier aux plumes que l’on croise sur les plateaux de télévision, dans les media, sur les têtes de gondole des librairies, tant le contenu peut émouvoir parfois ; tant la prose est belle. C’est ici que le pouls bat. C’est ici que l’on rencontre encore de vrais râleurs, de faux révolutionnaires, des donneurs de leçon, des joyeux, des tristes, des philosophes, des poètes égarés dans un monde qui n'est pas le leur ; c'est ici que l'on rencontre d’autres encore qui nous parlent d'un rêve enfin réalisé. Même si, pour cela, il leur a fallu attendre…quelques années.

Ce matin là, la lettre de « Marcel D., Saumur » m’interpelle. Ainsi, Marcel raconte-t-il qu’il émerge d’un sommeil réparateur après une veille de plus de 40 heures depuis Shangai où se terminait son périple chinois. Ses premières impressions ? « Je ne sais toujours pas quoi dire sinon qu’il y a beaucoup de Chinois ! » Et Marcel de nous expliquer qu’il avait calculé qu’en comptant un par seconde, pendant 10 heures par jour, il lui faudrait 100 ans pour rencontrer les 1 milliard 300 millions de Chinois vivant aujourd’hui. Et d’ajouter (plein de sel Marcel...) que ce peuple vit sous un régime autoritaire unique, autrement dit inconcevable dans notre France qui trouve le moyen de présenter 34 partis aux dernières élections européennes (j’aime !).

Pourquoi Marcel est-il donc allé en Chine ? Enfant, Marcel vivait en Normandie, dans une ferme. Il n’était pas rare alors de voir passer des vendeurs de reproductions qui proposaient « L’Angélus » ou « Les Moissonneurs » de Millet qu’on accrochait volontiers et fièrement à côté du diplôme du certificat d’étude encadré. Parmi ces tableaux, il y en avait un qui représentait les pitons de la rivière Li et un pêcheur aux cormorans. Et Marcel de nous avouer « Je ne sais pas pourquoi, je m’étais juré d’aller voir cela quand je serai grand ». Grand comment ? « J’ai attendu…90 ans avant de le voir, mais je l’ai vu ! ».

En lisant la chute de cette lettre, j’ai souri. Puis j’ai fait le tour des pièces de la maison. J’ai regardé s’il y avait des reproductions comme chez Marcel. Non. Sauf peut-être cette reproduction chatoyante et lumineuse d’une plage des Seychelles, l’œuvre du plus Seychellois des Britanniques, le peintre Michael Adams. Et de me dire en contemplant ce tableau "et si j’y allais, là, maintenant", avant d’avoir….90 ans ?