Sous la plume de Jeanne

Sous la plume de Jeanne

Et si nous chahutions les mots ?

Il est un exercice auquel je m’adonne depuis peu avec la même curiosité que celle d’un explorateur en terra incognita ; avec la même gourmandise que celle d’un pâtissier devant sa dernière création….J’anagramme (inutile de chercher ce verbe dans le dictionnaire, il n’existe pas). Dit autrement, pour les puristes du langage, je pratique modestement l’art de l’anagramme. Quand on sait que « ana » (ἀνὰ en grec) signifie « renversement », on imagine qu’il s’agit peut-être de mettre sans dessus dessous, de permuter, bref de chahuter les lettres d’un mot (voire d’une phrase pour les plus aguerris).

 

Que nous dit le Littré (éminent dictionnaire de la langue française) à ce sujet ?

«Transposition de lettres, qui d'un mot ou d'une phrase fait un autre mot ou une autre phrase. Les mots nacre et ancre sont des anagrammes les uns des autres. 

 

Récemment, j’ai fait la connaissance (derrière mon écran de télévision) du pape de l’anagramme, Jacques Perry-Salkow. Pianiste et compositeur, l’homme est aussi un amoureux des mots. Féru de littératures à contraintes (dont l’Oulipo fait partie et dont nous parlerons une autre fois tant le sujet est captivant), il publie son premier recueil d’anagrammes à quarante-huit ans.

 

D’autres opus suivront, tous plus insolites et savoureux les uns que les autres. D’autant que notre homme, infiniment doué pour l’exercice, joue dans la cours des grands, permutant parfois des groupes de mots pour en créer d’autres dont le sens peut contredire l’énoncé initial, ou le renforcer.

 

Petit florilège de ce talentueux « anagrammeur » : Le penseur de Rodin est « perdu en son délire »…

 

Depuis peu, le magazine Lire offre à Jacques Perry-Salkow une page intitulée « Des anagrammes et des livres ». Le principe : chahuter les lettres du titre d’un livre ou d’un écrivain et découvrir leur nouvel ordonnancement. Chaque mois, Jacques Perry-Salkow nous offre quelques pépites.

 

Ainsi de l’anagramme de Guillaume Apollinaire a surgi « Lou, la pluie, la migraine ».

De « La nuit des temps » de René Barjavel est sorti « Et  plus de matins »

De l’anagramme de l’écrivain Alain Mabanckou, Un câlin à Bamako....


Magique.

 

Pour Jacques Perry-Salkow, l’anagramme est sensuelle et voluptueuse… (http://www.lefigaro.fr/langue-francaise/actu-des-mots/2018/04/12/37002-20180412ARTFIG00250-jacques-perry-salkow-un-poete-renversant.php).

 

Je vous recommande vivement son dernier opus, "Anagrammes à quatre mains, une histoire vagabonde des musiciens et de leurs œuvres" (Jacques Perry-Salkow – Karoll Beffa – Editions Actes Sud) où il est question de chahuter quelque peu Lully, Bach, Chopin, Debussy, Satie…Et même Alice Cooper et Portishead.


Enfin, n’oubliez pas, si l’anagramme est « sensuelle et voluptueuse », c’est qu’elle est féminine (c'est une faute assez commune de penser que le mot est de genre masculin). Comment vous en souvenir ? Seul le genre féminin peut être renversant…Non ?

 

 

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23/05/2020
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